Zoom sur les enjeux de la création d’une norme paracylonique multi-aléas

Depuis le 1er juin a commencé une nouvelle saison cyclonique pour le bassin Atlantique. La saison, que les spécialistes prévoient plus active que la moyenne, va s’étaler administrativement jusqu’au 30 novembre 2022. Traditionnellement, la période d’août à octobre est la partie la plus active de la saison, le pic intervenant sur la première quinzaine de septembre.

Dans le bassin Atlantique, les phénomènes cycloniques à vents tourbillonnaires sont appelés, dépression tropicale, tempête tropicale ouragan (ou cyclone) en fonction de la vitesse maximum du vent soutenu en leur sein, c’est-à-dire le vent moyen mesuré sur 1 minute.

Les phénomènes sont nommés à partir des tempêtes tropicales et des vents mesurés supérieurs ou égaux à 63 km/h. C’est l’échelle de Saffir-Simpson qui est utilisée pour classer les phénomènes cycloniques :

 

 

Pour le bâti, les objectifs de la règlementation et de la normalisation paracycloniques sont de deux ordres :

  • Sauver des vies
  • Limiter les dégâts aux constructions

Pour certaines catégories de bâtiments, on pourra également avoir des attentes supérieures et viser la continuité d’activité.

 

C’est donc le vent qui est considéré comme l’aléa de référence pour les phénomènes cycloniques. On distingue deux types de vents :

  • Le vent soutenu mesuré sur une certaine durée
  • La rafale de vent qui est une mesure instantanée

 

Les charges de vent sur les structures sont calculées à partir de l’EUROCODE 1 partie 1.4 et l’annexe nationale française à la norme NF EN 1991-1-4. La valeur de base de la vitesse de référence du vent, Vb0 est la vitesse moyenne sur une durée de 10 minutes à une hauteur de 10 m au-dessus du sol.

S’agissant de cet aléa vent, Il y a cependant une grosse différence entre les tempêtes continentales et les ouragans tropicaux, ces derniers comportant en leur sein des vents multidirectionnels capables dans des zones périphériques de l’œil de solliciter des structures sous plusieurs angles pendant la durée de passage du phénomène.

 

Notons que, selon l’article L.122-7 du Code des assurances, n’est considéré comme catastrophe naturelle que « l’événement pour lequel les vents maximaux de surface enregistrés ou estimés sur la zone sinistrée ont atteint ou dépassé 145 km/h en moyenne sur dix minutes ou 215 km/h en rafales ».

 

Les ensembles charpentes/couvertures, les menuiseries extérieures et certains équipements techniques non structurels en toiture sont les éléments d’ouvrages les plus vulnérables aux vents cycloniques. Les révisions en cours de certains référentiels techniques dans le cadre du projet BatiSolid Antilles s’intéressent à ces éléments d’ouvrage vulnérables, au moment où les vitesses de base de référence du vent sont en cours de relèvement. D’autres éléments d’ouvrages comme les candélabres, des murs en maçonnerie, les revêtements de peintures peuvent également souffrir de l’action du vent.

 

D’autres aléas accompagnent les phénomènes cycloniques. Pour tous ces autres aléas, il n’existe aujourd’hui aucune règlementation ou norme spécifique et surtout exhaustive permettant de concevoir, dimensionner, construire ou entretenir les éléments d’ouvrages.

  • La submersion marine et les chocs mécaniques dus aux vagues liés aux phénomènes de marée et d’onde de tempête
  • Les pluies extrêmes et leur conséquences, mouvements de terrain, inondations, coulées de boues, lahars
  • La foudre

 

Lorsque le risque est élevé, le régulateur vise à interdire toute construction nouvelle au travers de la gestion de l’occupation des sols. Ce mode de gestion du risque montre néanmoins ses limites face à l’importance du bâti existant déjà présent sur ces zones dangereuses et face à la volonté d’acteurs divers de maintenir l’implantation d’enjeux sur ces secteurs pour des raisons patrimoniales, culturelles ou économiques. Les conflits d’implantation font débat, les élus locaux ayant la pression des habitants dans des territoires exigus où les terrains à bâtir sont précieux.

 

Le législateur est lui-même imprécis lorsqu’il crée une incitation fiscale pour les travaux de confortation parasismique et paracyclonique pour les immeubles à usage d’habitation de plus de 20 ans (article 199 undecies A du Code Général des Impôts) sans préciser la nature des travaux susceptibles d’être pris en compte dans le cadre de cet article du CGI.

 

Enfin, seule une approche multirisques a du sens aujourd’hui. Il faut ainsi concevoir et construire des immeubles capables de résister à la fois aux séismes et aux différents aléas associés aux cyclones.

Pour une construction littorale, la transparence du rez-de-chaussée est un excellent moyen de se prémunir contre le risque de submersion marine ; mais cette conception est désastreuse face au risque sismique en zone 5.

 

Une véritable réglementation paracyclonique n’est donc pas simple à bâtir et à mettre en œuvre. Pourtant, alors que le dérèglement climatique s’accélère, il faut résolument explorer les dispositions et techniques constructives, les matériaux de construction les plus adaptés qui permettraient de faire face au mieux à l’ensemble des aléas associés aux cyclones et même plus généralement aux aléas naturels.

 

Un projet à spectre large comme BatiSolid Antilles qui a des ramifications dans des domaines qui touchent à la solidité, la durabilité, l’efficacité énergétique, au confort d’occupation et à la faisabilité économique des projets de construction, a sans doute plus de possibilités que d’autres initiatives isolées de trouver le juste positionnement.